Le prince / la princesse de mes rêves viendra un jour…

par Véronique Kohn
Le prince la princesse de mes rêves viendra un jour...

Le thème de cet article s’oriente sur la question cruciale de la quête de l’amour idéal, de l’envie que l’on a presque tous de faire vivre l’amour sous la forme de la rencontre à deux, plutôt que sur un plan mystique où le besoin de croire à aimer et à être aimé n’a plus de raison d’être, puisqu’« être » tout simplement suffit à rayonner l’amour.

Pourquoi ce conte de fée nous impacte tant de génération en génération ? Quelle part de nous sait que l’amour idéal n’existe pas et se trouve contrariée par une petite voix tout au fond de nous qui persiste à y croire ?
Ce conte nous met en contact avec l’idée qu’une personne viendrait nous combler, répondre à nos attentes, nous prendre en charge pour nous amener au bonheur. Donc de se déresponsabiliser sur sa compétence à se prendre en charge pour y accéder.

Tout simplement parce que si je donne le pouvoir au prince(esse) de me rendre heureux(se), je perds de fait ma puissance personnelle à savoir me rendre heureux(se).
Et je préfère ainsi croire à une forme de perfection possible projetée sur une personne.
Le réel confirme sans cesse la déception du rêve et ce de relation en relation.
Alors si je me place sur un plan existentiel je vais continuer à y croire plutôt que de réaliser que je vise un Absolu que je veux transférer sur une personne forcément imparfaite puisque humaine et limitée.
Les enseignements spirituels dénoncent d’emblée la projection d’un Absolu sur une personne même si au fond ce que nous souhaitons le plus pour la plupart est d’ aimer, contribuer, prendre soin et partager ce que nous sommes.
Sur un plan spirituel, l’Absolu ne se visite qu’en faisant un retour sur soi, où le trésor se trouve juste là où on est, sans aucune quête à l’extérieur de soi.

Ce mythe est particulier. Pourquoi ?

Pour les femmes :

Le prince charmant est au service de la femme, il ne demande rien, il peut être perçu comme un fantasme égocentrique, être aimée plutôt qu’aimer. Il est « charmant » !
Il s’apparente au mythe du chevalier servant, ou des troubadours du moyen âge qui ne doivent pas passer à l’acte de peur de rompre le charme de l’émoi amoureux. Sans faille, il est parfait..

Pour les hommes :

L’homme fantasme plus sur une femme idéale que sur une princesse qui apparaît capricieuse, insatiable voire jamais satisfaite. C’est pourquoi le conte est sur le thème d’un prince charmant et non pas d’une princesse charmante.
La femme idéale prend plus la forme archétypale du féminin, douceur, beauté, sensibilité..

Ce mythe laisse croire comme beaucoup d’autres contes de fée qu’il suffit de s’aimer pour que l’amour soit éternel (ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants) ; la réalité du couple prouve l’inverse, la route est semée d’embûches, de crises parfois, rester ensemble sur du long terme implique un investissement de chacun pour apprendre à s’aimer.

Il y a tant de princesses et d’hommes déçus dans la plupart de nos histoires d’amour.
70% des couples se séparent mais la plupart vont répéter le schéma du couple parfois sous forme de famille recomposée. Le mot sérial monogame en vogue à notre époque couvre bien ce fait sociétal. On ne reste plus avec la même personne pour une vie comme le préconise le conte du prince charmant pour vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants. Sauf exception.
Malgré cela, le rêve du conte de fées perdure bien souvent tout au fond de nous même si le choc du réel vient tempérer ou mettre en cause cette croyance.

Un antagonisme apparaît, je sais qu’il(elle) n’existe pas mais j’espère tout de même le projet du couple harmonieux, à la hauteur de mon idéal.

Considérons le nombre de films romantiques dont le scénario se bâtit sur cette rencontre romantique, ce rêve de l’Absolu où nous transporterait le prince(esse) charmant.

Dès notre plus jeune âge nous sommes baignés par ce conte, et surtout pour les filles qui elles sont censées attendre patiemment voir passivement alors que les garçons, eux sont censés se doter de toute leur puissance virile pour séduire la princesse et la faire sienne.. pour toujours…

La souffrance émane de l’espoir du projet bâti sur le rêve de l’homme ou de la femme idéale (ou couple ou de la famille idéale). Tout projet marque un objectif à atteindre avec à la clé l’idée que l’on se fait du bonheur.. et voilà le postulat sous forme de représentation mentale : si je trouve l’homme ou la femme qui me correspond je serai.. heureux(se).
Et bien souvent cette idée que si.. je serai.. n’est pas conscientisée, y croire c’est se marquer d’une attente chargée sur un futur prometteur.. qui risque un jour ou l’autre d’être décu.

Avez-vous remarqué que ceux qui sont en couple rêvent d’être célibataires, ceux qui sont célibataires rêvent d’être en couple ?

Cet espoir là empêche d’écouter la vie. Le futur se construit à partir d’une mémoire du passé et nous piège, le futur n’est qu’une pensée. Une idée dérangeante avec une tension qui nous enferme dans un schéma.
Si je suis dans le présent, si je suis disponible et qu’une belle rencontre laisse présager du meilleur, suis-je capable de la vivre sans futur psychologique, puis-je vivre cette histoire dans ma présence d’instant en instant quelque soit la forme qu’elle prendra ?
Une confiance dans le futur est mal placée, elle n’existe pas. C’est une fuite vers un lendemain. La confiance est l’espace dans lequel toute les choses apparaissent et disparaissent. La confiance en quelqu’un ou dans un projet est un manque de maturité parce que l’on projette sur la personne en qui on va faire confiance notre tranquillité. Aucune situation, aucune personne ne pourra nous donner cette tranquillité.
Si mon attention n’est plus fixé vers quelque chose, si j’arrête de penser ma vie sur la manière dont elle doit se passer pour être heureux,. Si j’abandonne tout espoir c’est là où il y a la confiance, mais pas en quelque chose.
Puis je tisser la vie sans la savoir, sans se rappeler d’un passé déçu et y projeter un rêve du futur, sans se la représenter. Tant qu’il y aura un espoir il y aura déception.

Quand je peux voir mieux mon fonctionnement et être au courant que je suis une fabrique à produire le rêve de l’amour idéal, alors je ne fuis plus ma dépendance qui en suit, je ne cherche plus à me libérer de quoi que ce soit. Je vis le jeu de la vie au gré des rencontres mais sans m’agripper aux situations, ou en remarquant combien je m’agrippe quand je ne peux m’empêcher de retourner au rêve du prince charmant par exemple.

Au fond avec le recul, nous comprenons bien que chaque situation amoureuse vécue comme un échec n’en était pas en fait, il n’était question ici que d’expériences qui nous ont permis de nous rencontrer, de mieux nous comprendre, d’avancer sur notre chemin. Notre vie se constitue d’expériences, de joie, de souffrances, puis-je saisir que le chemin de vie est bien plus vivant que l’atteinte de nos objectifs si nombreux ? Et surtout celui de la quête amoureuse si celui-ci prend beaucoup de place dans notre vie ?

De manière atavique, gravé dans notre cerveau reptilien, l’archétype féminin a besoin de l’homme pour se protéger elle même et ses enfants. C’est l’une des raisons il me semble qu’encore aujourd’hui on peut constater que nombre de femmes échangent principalement entre elles autour du sujet concernant l’amour et les hommes de leur vie, alors que les hommes laissent plus de place à d’autres sujets.

Sauf celles qui sont tellement déçues par ce prince charmant si décevant dans le réel et sur le long terme qu’elles n’osent plus y croire et vont alors déployer des stratégies fonctionnelles pour faire face à la désillusion.

La femme rêve quelque part d’un homme fort et puissant sur qui elle peut s’appuyer, se sentir en sécurité. Et à l’extrême être prête à se soumettre où à s’y adapter pour garder le protecteur élu.
Biologiquement les femmes sont attirées par des hommes qui inconsciemment sont des géniteurs potentiels.

L’homme, lui rêve d’une femme idéale, une initiatrice, qui va lui permettre de le soutenir sur le plan de la verticalité, de sa réalisation pour cesser d’avoir besoin de prouver sa valeur sur le plan de l’image sociale bien souvent. Une femme qui croit en lui, qui incarne la beauté, la douceur et qui soit sexuellement attractive.
L’homme est aussi attiré souvent par une femme jeune, génitrice potentielle.
Classiquement, les femmes vont rechercher des hommes forts, riches, rassurants, puissants, protecteurs et les hommes des femmes jeunes et jolies.

De ces archétypes s’origine le conte du prince charmant où la belle est délicate, douce et le prince courageux et prêt à braver des obstacles pour prouver sa force.
Le succès de ce conte traverse les siècles et renforcent ces imaginaires archétypaux.

Concernant le rêve amoureux, hommes et femmes vont partager l’addiction à l’intensité de l’état amoureux, dès lors que placé devant le partenaire avec qui le rêve s’actualise, s’agrandit le goût de la fusion, de ce paradis perdu..

Bien des thérapies vont s’orienter pour nous libérer de cet état un peu infantile de croire à la fusion amoureuse si enchainée à la dépendance affective où l’on associe l’objet d’amour au sentiment qu’il nous a fait touché en nous.

Et pourtant n’est-il pas plus simple de ne rien changer, de simplifier et de vivre toutes les fusions, tous nos rêves du prince(esse) charmant(e) , de profiter de cet enthousiasme inhérent à l’état amoureux avec toute la liberté qui s’offre si l’on ne s’intéresse plus à l’aboutissement d’un projet sérieux.. Quand vais-je lâcher mes objectifs de vie que je me suis fixé qui m’empêchent d’être juste là à savourer le présent…que ce présent soit source d’extase ou de désillusion, de peines, de frustrations, quand vais-je arrêter de me comparer à ceux que j’imagine avoir réussi leur vie amoureuse..

En résumé, ce conte du prince charmant s’il est pris au sens propre parle de l’attente d’un objet d’amour extérieur qui viendrait nous combler alors que si on le lit au sens figuré, il explique la direction d’une quête intérieure, chemin initiatique où le prince et la princesse évoque la polarité masculine ou féminine manquante, l’une de nos parts intérieures qui cherche à se compléter en nous au lieu de la chercher toujours et encore à l’extérieur.

Réaliser que le prince charmant ou la femme idéale n’existe pas n’est pas une raison pour se priver de la rencontre amoureuse, ni d’être blasé par un réel abrupt lorsque l’on forme un couple, mais au contraire de se rencontrer soi dans cette part de nous qui rêve de jouer le jeu de la relation, mais peut être avec moins d’attentes.

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