La rupture amoureuse

par Véronique Kohn
La rupture amoureuse

La question de la rupture amoureuse est cruciale, à savoir qu’aujourd’hui en France 45% des mariages finissent par un divorce. Quant au nombre de séparations qui laisse des traces d’amertume indépendamment du mariage reste un sujet qui nous est commun à tous, et notamment à tous ceux qui se lancent dans une rencontre amoureuse, comme si de manière incontournable prendre le risque de rentrer en relation se corrèle à prendre le risque de la rupture et d’en souffrir.

Avec le temps, tout passe, .. A l’heure ou un couple sur trois se sépare, rompre est devenu banal, mais la séparation reste le plus souvent une expérience très douloureuse. 

« Nous ne sommes jamais aussi mal protégés contre la souffrance que lorsque nous aimons (Freud dans malaise et civilisation 1929) ».

Alors faut-il rompre ? A quel moment l’envisager, de quelle manière, et après la rupture comment puis-je me recentrer, me reconstruire ?

Evoquer le mot rupture amoureuse s’associe à une douleur psychique parfois très aigue et surtout quand la rupture est subie.

On va parler de deuil exactement comme pour un décès ; qui selon le parcours antérieur de l’individu va durer plus ou moins longtemps. Et nous ne sommes pas égaux sur la longueur du deuil, pour la traversée des affects douloureux qui vont plus ou moins nous submerger.

La séparation peut devenir le déclencheur de grandes difficultés : de dépressions majeures, de crises d’angoisses, de décompensations, quand il y a des terrains fragiles. Certains ne vont plus pouvoir travailler et vont être arrêtés. D’autres vont se réfugier dans l’alcool, la drogue, ou adopter des comportements, notamment sexuels, à risques… Et on a observé que chez 50% des personnes qui ont fait une tentative de suicide, le déclencheur était une séparation amoureuse. Dans une rupture, on a parfois vraiment l’impression que nous n’allons pas nous en sortir. Que nous ne pouvons pas vivre sans l’autre, que nous allons mourir. Des angoisses archaïques de séparation et même de mort peuvent ressurgir. C’est très physique, comme sensation.

Celui qui décide de mettre un terme est en général moins perturbé, il est en position haute. On peut se poser la question pour ceux qui rompent en premier si la peur d’être quitté ne les motive pas à agir ainsi et si cela n’est pas une manière de garder le contrôle pour éviter un sentiment d’impuissance intolérable.

Ce sentiment d’impuissance dans une séparation est renforcé par la perte des repères que fournit le couple, comme une bulle qui se forme en guise de protection, créant une illusion de stabilité, d’un projet couple qui se projette dans l’avenir.

La souffrance est souvent corrélée à l’idée de projection dans le futur, comme si sans l’autre la vie va devenir moins supportable, moins agréable, « moins …» même si on ne sait pas toujours définir ce que l’on y place dans ces …

Mais pour ceux qui ont vécu plusieurs ruptures sentimentales, le constat est que quelques années après, avec le recul, ils en viennent à se demander comment le regard porté à ce moment là pouvait être si gonflé d’admiration, de fascination.. avec des zones aveugles sur les mauvais moments.

Pourquoi rompre ?

Nous sommes des êtres concernés par des besoins de relation, de bien-être, d’autonomie, de paix, de respect, de tendresse, de sexualité, de valeurs communes.

Si certains de nos besoins ne sont pas couverts, selon la capacité de le tolérer, nous allons commencer à remettre en question le bien fondé de la relation.

Selon aussi notre sensibilité à des valeurs prioritaires qui nous déterminent, nous allons évaluer que notre partenaire n’est pas à la hauteur de celles-ci (authenticité, respect, justice, bienveillance, liberté).

Pour ceux qui rompent trop vite :

Ils vont à ce moment là dire,  « je ne l’aime plus » au lieu de concevoir que certains de nos besoins ou valeurs ne sont plus couverts. Et peut être décider de le quitter dans un « je ne l’aime plus » comme avant …Et ce qui est pathétique, n’est pas qu’on ne l’aime plus, c’est juste un besoin non satisfait, alors avant de « jeter le bébé avec l’eau du bain » peut être voir si le partenaire peut faire un pas pour nous aimer comme l’on souhaiterait l’être.

Les besoins les plus courants qui signalent une rupture prochaine sont :

  • le manque de désir sexuel
  • la violence verbale et ou physique, (besoin d’intégrité, de respect)
  • le manque de temps, d’attention de votre partenaire
  • le décalage des points de vue, des valeurs, (besoin d’harmonie, empathie).

En prenant tout à cœur, on a peu de marge de tolérance quant aux réactions du partenaire.

Si je ne comprends pas les systèmes de défense liés à des réactions de survie, je vais être vite jugeant et me méprendre sur l’hostilité apparente. Bien souvent , l’autre nous apparaît comme un ennemi alors qu’il devrait être notre meilleur allié, mais nos comportements peuvent réveiller ses blessures et il va réagir dans un mode fuite ou attaque qu’il ne contrôle pas.

Comprendre ses besoins sous jacents diminue la réactivité, et s’exprimer sans agresser remet du lien là où nous percevons notre partenaire comme un ennemi. (Notre cerveau de survie ne fait pas la différence, soit c’est un allié, soit un danger pour nous).Dans ce cas, nous ne pouvons guère mener de relations au long terme, parce que pour un(e) écorché(e) vif (ive), les moindres remarques ou frustrations sont interprétées.

Préférer rompre c’est aussi prendre le pouvoir et donc moins souffrir. Mais c’est un schéma répétitif qui mène à la solitude.

Pour ceux qui au contraire qui ne veulent pas rompre :

La relation est là pour nous apporter plus de joie que de souffrance, même s’il est inconcevable d’imaginer un couple sans tension, sans crise non plus, mais globalement la relation n’est pas un lieu de travail, de dépassement de soi, (dans certains milieux on a l’habitude d’entendre que la relation sert à se faire grandir mutuellement..) ; mais un lieu de ressourcement sinon à quoi cela sert d’être à deux ?

Sur ce principe là, nous sommes à priori tous d’accord mais parfois nous gardons l’espoir que l’autre change, qu’il revienne à ce qu’il nous promettait au début, et cet espoir ne nous fait pas vivre !.. Au contraire, comme un enfant qui aurait garder l’espoir que son parent toxique puisse se changer en bon parent un jour, certains adultes se maintiennent dans des relations de dépendance malsaine en espérant que le vent tourne.

Comment rompre ?

Deux cas se présentent

Soit la relation se termine d’elle-même, on se quitte en toute amitié parce que l’on sent bien que l’on n’a plus de raison de cheminer ensemble.

La rupture se fait en douceur dans ce cas là.

L’autre cas, plus fréquent, est beaucoup plus compliqué à gérer. Il s’agit d’une relation suspendue avec rupture brutale. La relation s’arrête alors que vous avez l’impression de ne pas en avoir fait le tour, difficile de ne pas verser de larmes ou de cris sur ce type de rupture.

Au mieux : parler de soi, éviter les reproches à l’infini, et voir si celui qui a décidé de rompre est inflexible.

Puis permettre un espace de communication à froid, à l’écrit par exemple pour que chacun puisse s’exprimer et expliquer ce qui le motive sans animosité.

En d’autres termes, dire qu’on n’y arrive plus, que l’on a besoin d’emprunter d’autres chemins, que l’on ne se sent plus bien dans cette relation, plutôt que reprocher telle ou telle manie, tel ou tel mot malheureux, etc.

Également à proscrire, « le reniement ». « C’est une chose de vouloir quitter celui ou celle avec qui l’on était, c’en est une autre que de gommer tout ce qui a existé. Même si malheureusement, quand on n’aime plus du tout, on a tendance à oublier qu’on a aimé. Mais reconnaître ce qu’on a partagé, ne pas jeter avec l’eau du bain ces années de vie commune, c’est une façon de ne pas nier l’autre et les sentiments qu’il ou elle peut encore avoir. »

… Sans laisser place à l’incertitude

La meilleure façon de ne pas blesser davantage la personne qui subit la rupture c’est de la décider de façon franche et définitive. Il n’y a rien de pire que l’incertitude ou le flou quand on est en train de se séparer.

Eviter de se positionner pour ne pas faire souffrir augmente le flottement, l’incertitude et l’angoisse chez l’autre.

Après la rupture, comment gérer ?

Les chercheurs ont étudié des images de cerveaux d’hommes et de femmes qui se disaient très amoureux. Ils ont constaté que les circuits cérébraux impliqués dans les relations amoureuses étaient les mêmes que ceux impliqués dans des comportements addictifs. L’hypothèse des chercheurs est que surmonter une rupture serait ainsi comme surmonter une addiction à la drogue.

C’est pour cela qu’il est important de couper le lien et de ne plus avoir du tout de relations avec l’ex. Et ce pour celui qui le vit de manière souffrante.

Si vous restez sur le même territoire, sa présence empêche le deuil de se faire.

Déjà quand bien même la personne n’est plus présente physiquement, vous risquez d’être envahi par des images d’elle, des pensées obsessives, des souvenirs.

Comme toute dépendance, il faut penser à se sevrer, même si les raisons ne vous semblent pas juste pour vous, elles sont ce qu’elles sont. Si vous restez bloqué sur le passé, vous faite exister votre ex virtuellement alors qu’il n’est plus, donc vous lui donnez beaucoup de place encore dans votre vie.

Sans chasser non plus les émotions de tristesse, de colère liées au deuil, pensez à alterner entre l’accueil des phases dépressives et des phases où vous n’entretenez pas non plus l’image de l’ex ; les ruminations ne sont plus qu’un film du passé, donc purement psychologiques, seul le présent est notre réalité dans le fond.

Il y a un goût à faire remonter les souvenirs, à entretenir l’image de l’ex, comme si par ce biais vous aimez être dans la peau d’un(e) amoureux(se) transi(e)..et que finalement cette image romantique de vous même est plus importante que de passer à autre chose. Nos motivations à entretenir un deuil ne sont pas toujours conscientes.

Notre cerveau peut agir pour corriger certaines émotions et ouvrir la porte à de nouvelles attirances et à la formation de nouvelles relations si nous ne fixons pas sur l’idée qu’il n’y a que lui qui nous rend heureux. (Ce qui est faux puisqu’il nous a quitté, s’il nous aimait de manière inconditionnelle il serait là).

De la même manière que surmonter son addiction à la drogue permet à ses chances de survie d’être augmentées, passer à une autre relation aurait toujours été avantageuse du point de vue de l’évolution, question de reproduction. Qui dit rupture dit potentiel de nouveau partenaire ; dit nouvelles possibilités de procréer… C’est aussi simple que cela.

Donc cesser de croire que vous vivez en pénurie d’hommes ou de femmes, qu’il n’y en aura pas un autre aussi formidable pour vous que lui ou elle.

Sans tomber dans les excès non plus où vous ne supportant pas la solitude et la souffrance du deuil, vous remplacez immédiatement ce partenaire par un autre. Un de perdu.. 10 de retrouvés selon le fameux dicton..

Fixation sur le passé ou évitement du deuil et remplacement de l’objet d’amour en formant de suite un couple, sont à éviter.

Sortir de la répétition amoureuse

Parfois, les histoires – et les ruptures – se suivent et se ressemblent. Mêmes scénarios, mêmes personnes qui nous attirent, mêmes relations dévastatrices… Une répétition amoureuse qui trouve souvent son origine dans notre enfance.

« Lorsqu’on s’interroge sur nos échecs amoureux, il est intéressant de travailler sur nos schémas qui nous conduisent à répéter des scénarios de vie. Que vient-on reproduire de notre enfance ou d’une certaine situation que nous avons pu vivre étant enfant ? Souffre-t-on d’un schéma de méfiance (« les gens peuvent trahir et décevoir ») ? D’imperfection (« si les autres savaient qui je suis réellement, ils ne m’aimeraient pas ») ? De dépendance (« je ne peux pas me débrouiller tout seul ») ? De carence affective (« personne ne pourra jamais m’aimer ») ? … Un travail qu’il est parfois bon de mener avec l’aide d’un professionnel.

La durée du deuil

Certains se remettent plus facilement que d’autres d’une rupture amoureuse, si vous disposez de ressources, que vous vous passionnez pour votre vie en dehors de la vie amoureuse, vous aurez plus de chance que le deuil dure moins longtemps .

Si au contraire votre vie se construit autour d’une personne et que tout tourne autour, vous allez agrandir le temps du deuil.

Moins vous êtes connecté à vos dons, vos talents, votre créativité, plus vous êtes dépendants affectifs et plus le deuil est long.

Une autre piste pour rebondir, c’est de transformer les sentiments de tristesse, de désespoir, d’impuissance dans une tâche créative, comme le font les artistes, poètes, et tous les résilients.

Je poste ci-dessous en exemple le texte d’une femme qui a du mal à tourner la page deux ans après, le texte a une saveur romantique, on voit ici l’orientation de l’attention psychique portée sur les bons souvenirs, la consécration à la passion pour une personne (qui renvoie au goût de l’âme sœur).

Jusqu’où ce mono-investissement peut nous rendre dépendant et à la fois permet de jouer un rôle d’amoureuse transie, un rôle que l’on peut chérir plus que tout au détriment de la souffrance subie.

Pour Spinoza la passion triste se différencie de la joie active qui est notre vraie nature, dans la mesure où pour lui l’amour est une joie qu’accompagne l’idée d’une cause extérieure. Faire dépendre notre bonheur d’un objet d’amour placé à l’extérieur nous conduit à une passion triste. Il s’agira de faire en sorte que le plus grand nombre de nos passions soient joyeuses, et passer aux sentiments libres et actifs.

Véronique Kohn le 12 février 2017

Voici le texte :

« En fait ça fait à peu près deux ans que c’est à peu près finit avec mon chéri. On est d’accord qu’il y a eu un changement, un avant un après ce moment.
Déjà.
Ça fait un peu plus d’un ans et demi que tu es parti. J’ai impression que c’était hier. Je pensais que je perdrais le timbre de ta voix le grain de ta peau. Que nenni, je comprends ce que voulait dire Mr Bobin avec son livre : « La plus que vive ». Mon téléphone bug et parvient à me sortir des textos de toi à l’improviste. Des amis me parlent de paroles toutes imprégnées de toi.
Tu es la, plus que vivant.

Entre cette rupture qui n’en finit pas et ce deuil qui.. Je ne sais pas.
Serait-ce pourquoi j’ai l’impression de ne plus pouvoir être amoureuse ces jours-ci?
Enfin je ne sais pas ce que c’est mais c’est la.
Ptet que mon cœur est fatigué. Tout ces gens qui meurent. Et mon sexe qui. .. C’est comme si tout était plus fermé.

Alors la liste des petits noms qu’il me donnait :

Batata Haloua
Rouma
Balala
Habiba
Hadouda
FéeLynx
Les yeux de la lionesse
Patapoufesse
Guignola
Sale guignarde
Espèce de sorcière
T’es mon doudou
MAW
Zizotte
Didou
Didouda
Zizouzou
Mahou
Fofolle
Pitita

Tous ces mots.

Ptet c’est pour ça. Je m’attache amoureusement avec passion fort rarement. Parce que je ne m’en remet jamais. Jamais jamais. Et c’est un peu fatiguant pour mon cœur.
Du premier au dernier que j’ai aimé ils sont tous la toujours dans mon cœur. Qui craque là un peu je crois. »

Téléphone mobile : 06 11 51 53 64

3 rue Armand Barbès 34170 Castelnau-le-Lez

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